CO N°1344 (15 février 2025) – Haïti – Pas d’unité avec l’armée ! Danger !

Lors de la commémoration du déchoukage de Jean-Claude Duvalier le 7 février, le président intérimaire Leslie Voltaire s’est entouré de représentants des forces armées, de la Police nationale, de la Mission multinationale de soutien. Il a fait le constat « que des droits inaliénables acquis en 1986 sont aujourd’hui en péril ».

Au renversement de Jean-Claude Duvalier la démocratie a remplacé la dictature, a-t-il dit : « ce jour-là, nous avons conquis des droits inaliénables comme la liberté d’expression, liberté de réunion », « aujourd’hui, ces acquis sont en péril ».

Face à ce péril, il lance à la population un appel à l’unité, une unité avec la police et l’armée.  Il décrète l’année 2025 comme l’année du mariage sacré entre  la Police nationale d’Haïti, les forces armées et le peuple haïtien. Qui a intérêt à cette   unité ? Pas la population laborieuse.

Ce discours, la population laborieuse d’Haïti l’a entendu en 1986 : « vive l’armée, à bas les macoutes » et il a été repris par les politiciens et le père Aristide jusqu’à son élection en 1990.

Duvalier fils avait, certes, été chassé en février 1986 par la colère de la population. Les macoutes étaient poursuivis, cherchaient à se cacher pour fuir la revanche de la population pauvre. Mais la chasse aux macoutes a épargné les véritables dirigeants qui prospéraient sous la dictature, la bourgeoisie haïtienne. La haine de la population envers les macoutes a préservé l’autre instrument de répression de la bourgeoisie, l’armée d’Haïti. Elle est restée intacte, se préparant à être utilisée le moment venu.

Le président Aristide avait lui aussi en 1990 appelé le peuple haïtien à faire l’unité avec l’armée. C’est lui qui a dit que le peuple et l’armée sont des jumeaux, qu’ils sont liés comme « pwason krazé nan bouyon » (le poisson émietté dans le bouillon).  Il avait fait acclamer le général Cédras au balcon du quartier général de l’armée après le coup d’État du chef macoute Lafontant le 7 février 1991. Alors que c’est la mobilisation de la population des quartiers populaires qui avait bloqué Lafontant. Faisant échouer le coup d’État, Aristide en attribua le bénéfice à l’armée. Il avait alors appelé à faire confiance à l’armée. Car s’il s’était appuyé sur la mobilisation des masses, il redoutait qu’elles s’organisent jusqu’à se libérer de l’exploitation des possédants.

Au final Aristide avait désarmé moralement les habitants des quartiers pauvres et, au moment du coup d’État le 29 septembre 1991, ils se sont retrouvés surpris, démunis. Pour réussir leur coup, cette fois les militaires ont systématiquement massacré les habitants des quartiers populaires, ils ont tiré jusqu’à ce qu’ils se soumettent.

Ce massacre de la population par l’armée en 1991 est connu de Leslie Voltaire et des divers politiciens. Pourtant ces politiciens proposent à nouveau l’intervention des forces armées assassines de la population et toujours au service des possédants. Ils ont choisi le camp des possédants.

La population des quartiers populaires, les travailleurs, les pauvres ont une autre proposition, celle d’une armée des travailleurs, une population en armes. Elle seule a la capacité de déchouker les bandits, comme les habitants des quartiers avaient déchouké les macoutes en 1986. Elle seule a la possibilité de poursuivre cette action par le déchoukage de la bourgeoisie commanditaire de ces bourreaux armés.