(Extraits des déclarations de Gary Walkowicz, ouvrier de l’automobile, membre de l’UAW (Union des travailleurs de l’automobile) et lié au groupe trotskyste « The Spark ».)
Le 15 septembre, des travailleurs des trois grandes entreprises de l’automobile aux USA : Ford, GM (Général Motors) et Stellantis sont entrés en grève. C’est le syndicat UAW qui a lancé le mot d’ordre de grève. Ils ont fermé une usine d’assemblage dans chaque entreprise. Sept jours plus tard, les dirigeants syndicaux n’ont appelé que les centres de distribution de pièces de GM et de Stellantis, ce qui n’a eu d’impact sur aucune production de véhicules.
Les travailleurs de l’UAW ont aujourd’hui toutes les raisons de lutter, car nous avons beaucoup perdu. Jusqu’au début des années 1970, les travailleurs de l’automobile avaient acquis par leurs luttes un niveau de vie correct, meilleur que celui de leurs parents et promettant un avenir meilleur à leurs enfants. Après la 2ème Guerre mondiale, les capitalistes américains étaient devenus la puissance militaire et économique dominante dans le monde. Aussi, face aux grèves pour de meilleurs salaires et avantages sociaux, ils cédaient un peu. Les travailleurs de l’automobile avaient un niveau de vie acceptable. Plus maintenant !
De 2007 à aujourd’hui le salaire horaire dans l’automobile, ajusté à l’inflation, a baissé de 30 %. Actuellement les nouveaux embauchés dans l’automobile sont nombreux à avoir un second boulot juste pour survivre.
Revendications de « remboursement »
Quand les négociations ont commencé, la nouvelle direction de l’UAW a dit que les travailleurs doivent récupérer ce qui a été perdu. Ils ont donc revendiqué 46 % d’augmentation du salaire pour la durée du contrat et des ajustements pour le coût de la vie. Les chefs de l’UAW ont demandé la fin des grades et des emplois temporaires (CDD) afin que tous les salariés aient la paie maximum. Ils ont demandé des pensions et des aides aux soins pour les retraités. C’est sûr, les salariés méritent chaque centime de ces revendications ! Mais ils ont droit à beaucoup plus si on compte toutes les concessions arrachées aux ouvriers. La plupart de ce qu’ils nous ont volé est allé à des gens qu’on ne voit jamais, les capitalistes de Wall Street propriétaires d’usines automobiles. Ils tirent des milliards de notre travail.
Les médias aussi, tenus par de grosses corporations et Wall Street, ont hurlé contre ces revendications syndicales.
Les compagnies ont l’argent
Selon la Deutsche Bank, les revendications de l’UAW auraient coûté 5 milliards de dollars pendant un an ! C’est ce que Ford seul a payé cette année à ses actionnaires ! Les « trois grands » de l’automobile ont gagné 250 milliards de dollars la dernière décennie !
Les suppressions d’emplois
Mais ce qui a vraiment enrichi les patrons de l’automobile ce sont les centaines de milliers d’emplois qu’ils ont supprimés, obligeant un ouvrier à travailler de plus en plus pour gagner de moins en moins. En 1979 il y avait un million de travailleurs chez les « trois grands ». Aujourd’hui ils sont 145 000 !
Aujourd’hui les compagnies ne se cachent pas : avec la fabrication de voitures électriques ils éliminent des emplois. Déjà dans les usines de fabrication de batteries des centaines de milliers d’emplois ont disparu. Enfin ces exploiteurs prévoient de ne vendre que des voitures de luxe, donc chères : moins d’acheteurs, moins d’emplois !
Les conditions de travail sont pires
Déjà un travailleur fait la tâche de deux, trois, voire quatre salariés, avec des horaires infernaux, usant sa santé. Il doit travailler la nuit et la journée dans la même semaine, réduisant ainsi son espérance de vie.
Une lutte commence
Les patrons ont engagé une guerre contre les ouvriers et de 1976 à 2019 le syndicat n’a appelé à aucune lutte contre eux.
En 2019, l’ancienne direction de l’UAW appela à une grève contre GM, première résistance en 43 ans ! Aujourd’hui la nouvelle direction appelle à une grève dans trois compagnies mais avec 25 000 travailleurs, moins qu’en 2019 !
L’UAW se sert des travailleurs appelés à la grève pour que les patrons renoncent à un peu d’argent. Même si les compagnies accèdent aux demandes des chefs de l’UAW, cela ne va pas améliorer les conditions de travail dans les usines, ni remettre le nombre d’emplois déjà supprimés.
Les travailleurs de l’automobile ont beaucoup plus de pouvoir que ce qu’ils ont montré. Ils peuvent se battre pour plus que de petites augmentations. Ils peuvent lutter pour plus d’emplois, de meilleures conditions de travail et une vie confortable.
Mais cela exige un combat différent de celui proposé par l’ancienne et la nouvelle direction de l’UAW.
On dira que les travailleurs UAW des trois grosses compagnies ne peuvent faire cette lutte seuls. OK ! Mais avant tout, nous devons utiliser toutes nos forces, les 145 000 de Ford, GM et Stellantis ensemble pour mener la lutte, pas juste quelques uns.
Nous devrons alors attirer ces centaines de milliers de travailleurs de l’industrie automobile qui travaillent dans ces usines, des travailleurs sous-payés et plus exploités. Il y a aussi tous les travailleurs de l’automobile des compagnies sans syndicat qui ont leurs propres raisons de lutter pour davantage.
Et pour chaque emploi dans automobile, six autres jobs sont connectés, des travailleurs dans l’acier, le caoutchouc, le plastique et le transport. C’est une grande part de la classe ouvrière.
On dira qu’une telle lutte ne peut se faire. Oui, en 1936 et 1937, de nouveau en 1945, des grèves d’ouvriers de l’automobile se sont étendues dans la classe ouvrière. D’autres travailleurs se sont joints, pas juste en soutien, mais pour mener leur propre lutte. C’est pourquoi ces grèves ont accompli autant. Cette fois, nous ne devons pas arrêter !