Le 18 novembre 1803, l’armée des ex-esclaves noirs d’Haïti triompha de la plus grande armée d’Europe, celle de Bonaparte, lors de la bataille de Vertières. Cette force armée considérable avait été envoyée pour rétablir l’esclavage. La victoire ouvrit la voie à l’indépendance. Le 1er janvier 1804, la colonie française de Saint-Domingue devint la république d’Haïti.
Le 29 août 1793, le commissaire Sonthonax de la Convention de la République, issue de la Révolution française, avait déclaré l’abolition de l’esclavage, alors que les troupes anglaises étaient sur le point de débarquer.
Pour rétablir l’esclavage aboli par la Convention, Bonaparte dépêcha en mai 1802 une armada de 22 000 soldats et 86 vaisseaux, sous les ordres de Leclerc et Rochambeau. Lorsque les troupes françaises débarquèrent en 1802, Toussaint Louverture, premier chef des insurgés d’Haïti, fut fait prisonnier et expédié en France où il mourut en prison, au fort de Joux dans le Jura.
Une nouvelle insurrection partit dans le Nord de Saint-Domingue. Le général Leclerc écrivit à Bonaparte : « Ce n’est pas tout d’avoir enlevé Toussaint, il y a ici 2 000 chefs à faire enlever ».
Les chefs noirs de l’armée, Dessalines, Christophe, Pétion, prirent la tête des insurrections. Le Congrès de l’Arcahaie (15-18 mai 1803) consacra Dessalines général en chef de l’armée dont le mot d’ordre est « la Liberté ou la Mort ».
De mai à novembre 1803, des batailles sanglantes se déroulèrent entre l’armée de Napoléon dirigée par Rochambeau et celle des insurgés d’Haïti.
La bataille de Vertières du 18 novembre 1803, fut la dernière grande lutte où les Noirs anciens esclaves mirent fin à la domination française et à l’esclavage.
Dessalines ordonne de prendre le fort de Vertières, situé sur une colline à côté de la ville de Cap-Français. François Capois, dit Capois-La-Mort, commande une demi-brigade qui est en partie décimée par le tir des canons en provenance du fort. Capois-La-Mort lance l’assaut quatre fois contre les Français, sans succès. Mais ses troupes ne baissent pas les bras et attendent les renforts envoyés par Dessalines. Quand ceux-ci arrivent, les combats redoublent d’intensité. Le soir venu, les deux tiers des soldats français ont été tués ou blessés.
Le lendemain, les pourparlers entre les officiers français et Dessalines durent une journée entière. Avant la tombée de la nuit, un accord est signé. Rochambeau obtient dix jours pour évacuer le fort de Vertières, embarquer ce qui reste de son armée et quitter Saint-Domingue !
À Vertières, ce 18 novem-bre 1803, les soldats noirs sous-équipés, mal nourris, ont vaincu la plus puissante armée d’Europe venue pour les remettre en esclavage. Ils ont repris le chemin des esclaves de Rome, qui avaient formé une armée dirigée par Spartacus qui avait fait vaciller la puissance romaine avant d’être glorieusement vaincus. Ceux d’Haïti ont glorieusement gagné.
Dans cette guerre contre le rétablissement de l’esclavage, les masses pauvres exploitées ont démontré qu’elles pouvaient trouver les ressources et les armes pour se battre contre l’oppresseur. Les esclaves d’Haïti, les opprimés, ceux qui étaient au plus bas de l’échelle sociale, les damnés de la terre, ont gagné et se sont libérés eux-mêmes.
De telles victoires nourrissent notre optimisme révolutionnaire. C’est un exemple de lutte pour tous les exploités de la Terre. Cela ne peut que renforcer la foi en l’avenir des esclaves modernes d’aujourd’hui, les esclaves salariés, les travailleurs du monde entier. Eux aussi parviendront à se libérer du joug de leur exploiteur : la bourgeoisie.
Une anecdote significative :
Pendant la bataille, un messager personnel de Rochambeau monta sur son cheval et partit vers Capois-La-Mort. Il cria : « Le général Rochambeau envoie des compliments au général qui vient de se couvrir de gloire comme ça ! ».
Le lendemain de la bataille, un officier français se rendit au quartier général de l’armée haïtienne sur un cheval, il portait le message suivant : « Le capitaine-général Rochambeau offre ce cheval comme une marque d’admiration pour l’ « Achille noir », pour remplacer celui que son armée française regrette d’avoir tué ». L’Achille noir désignait le général François Capois dit Capois-La-Mort qui était aux commandes lors de la bataille de Vertières.