Le président d’Haïti Jovenel Moïse a été assassiné dans la nuit du 6 au 7 juillet par un commando. Peut-être même a-t-il été tué par l’une de ses propres bandes armées. En effet, alors même que Jovenel Moïse est entouré de dizaines de gardes armés, il n’y a eu aucun affrontement entre ces derniers et les assaillants. Aucune victime parmi les gardes n’a été signalée.
Depuis l’annonce de la mort du président, on ne note aucune manifestation particulière dans la population. Le président n’est visiblement pas regretté. Il était haï de la population, jugé en grande partie responsable de l’insécurité grandissante, et de la terreur que font régner les gangs armés. Ces derniers ne se refusent rien depuis plusieurs mois. Agissant en toute impunité, ils n’avaient qu’un pas à franchir pour assassiner le président lui-même. Et le pas a été franchi.
Jovenel Moïse n’est plus, mais le chaos continue de régner en Haïti. La misère s’aggrave pour les classes pauvres, les groupes armés pullulent. Rançonner la population après kidnapping est leur action favorite.
La guerre entre les gangs continue avec des prises d’otage et des règlements de compte qui mettent les habitants des quartiers en péril.
C’est ainsi que plus de 5 000 habitants ont dû fuir leur quartier au sud de Port-au-Prince pour se réfugier dans un centre sportif ou chez l’habitant, en attendant que la situation leur permettre de regagner leur logement. C’est le même scénario dans plusieurs autres quartiers de la zone métropolitaine : des déplacés par milliers fuyant la terreur des bandits.
Le 30 juin, 15 personnes ont été tuées dans la nuit quand des gangsters à moto ont tiré sur la population à Delmas 32, un quartier pauvre de la capitale. Cette fusillade a fait la une des médias car parmi les victimes figuraient un journaliste et une militante politique. C’est un nouvel épisode de la guerre que se livrent les gangs qui contrôlent différents quartiers de la capitale. Une guerre qui s’est intensifiée depuis le début de l’année avec une organisation des différents gangs en regroupements plus importants. Ces hommes de main, armés par les gouvernements successifs pour maintenir la population sous pression et garantir l’élection de leurs commanditaires, travaillent aussi pour leur propre compte maintenant. Avec plus de 150 groupes, représentant au moins 3 000 hommes, ils sont devenus avec le temps des troupes armées qui échappent au contrôle du gouvernement. Ils terrorisent la population et la rançonnent.
En Haïti, la valeur de la gourde (monnaie locale) chute face au dollar, entrainant une augmentation du prix des produits de base alors que les salaires diminuent. Suite à une pénurie artificielle due aux affrontements entre gangs, le prix du carburant a augmenté, entrainant une flambée du prix des transports. La population est aux abois.
La perspective de ces gangs, c’est la terreur sanguinaire. Ils ont choisi d’être au service des possédants, des banquiers, des bourgeois et des politiciens à leur botte. Un de leurs chefs politiques, le président, a donc été victime de son propre système.
Mais les travailleurs d’Haïti sont bien plus nombreux que ces bandes de tueurs. Ils constituent une force qui, armée et organisée, peut avoir raison des gangs. En faisant la peur changer de camp, ils sauveront non seulement leur peau, mais créeront une force politique indépendante, capable de renverser le système d’exploitation capitaliste et ses serviteurs politiques. Certains s’y préparent en regroupant autour d’eux des noyaux de travailleurs conscients. C’est la seule perspective valable au moment où de nombreux travailleurs tombent sous les balles des bandes armées.