Le 26 octobre 1961, les militants de l’Union départementale CGT fondaient la Confédération générale du travail de la Guadeloupe (CGTG).
L’UD-CGT, aux origines de la CGTG
L’Union départementale de la CGT française avait été fondée en Guadeloupe en 1936. Il y a donc 85 ans.
L’UD-CGT était née dans un contexte de luttes. En France la grève générale de 1936 a démontré la force de la classe ouvrière. C’est cette grève qui a permis entre autres aux travailleurs d’obtenir les congés payés. En Guadeloupe aussi, les luttes furent fortes, nombreuses, principalement dans le secteur sucrier.
À cette époque, la classe ouvrière était concentrée dans les usines à sucre et les champs de canne.
En Guadeloupe, des militants du mouvement ouvrier se regroupèrent pour fonder l’UD-CGT qui fusionna les principaux syndicats existant à l’époque.
Les luttes sociales d’après-guerre
Le 19 mars 1946 les colonies de Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion, deviennent départements français. Mais ce changement de statut n’arrête pas l’oppression brutale du colonialisme sur les travailleurs et ne ralentit pas la misère. Pendant et après la Seconde Guerre mondiale, la pauvreté s’était considérablement accrue.
Il a fallu que la classe ouvrière lutte pendant presque 50 ans pour obtenir l’égalité des droits ou presque avec les travailleurs de l’hexagone, la Sécurité sociale, ou encore le même SMIC.
En 1946, se déroule la grande grève des travailleurs de l’usine Marquisat à Capesterre-Belle-Eau pendant laquelle l’usinier Descamps fut prisonnier des grévistes. Les ouvriers ont gagné une augmentation de salaire.
En 1949, les fonctionnaires locaux font grève pour l’application en Guadeloupe de la Sécurité Sociale.
Le 14 février 1952, l’État colonial français fait tirer sur des travailleurs dans le bourg du Moule pendant la grève générale des ouvriers de la canne pour des augmentations de salaire. Chaque ouverture de récolte au mois de février est une passe d’armes entre ouvriers et patronat sucrier.
En 1953, après trois mois de grève, les fonctionnaires antillais obtiennent la prime de vie chère de 40%, déjà perçue par les fonctionnaires venant de l’hexagone.
Le rôle du Parti communiste guadeloupéen (PCG)
D’abord Section guadeloupéenne du Parti communiste français en 1944, le parti devient « Parti communiste guadeloupéen » (PCG) en 1958. Il est issu du mouvement stalinien international. Le stalinisme provenait d’une monstrueuse déviation de la révolution bolchévique ouvrière d’octobre 1917 dirigée par Lénine et Trotsky en Russie. Staline et son entourage prennent le pouvoir en 1923 et font assassiner par étapes toute la génération des révolutionnaires russes de 1917.
Cependant, bien des militants sincèrement communistes à l’origine du PCG ont joué un rôle important dans les luttes sociales et la création de l’UD-CGTG comme Pierre Tarer ou Hermann Songeons. C’était l’époque où Rosan Girard, co-fondateur du PCG, galvanisait les foules et en particulier les travailleurs.
Depuis leur création et jusqu’à la fin des années 70, l’UD-CGT puis la CGTG ont dû affronter la répression du pouvoir colonial. Les militants ouvriers étaient systématiquement repérés, fichés. Certains furent emprisonnés plusieurs fois à cause de leur activité syndicale et politique.
La CGTG : de 1961 à nos jours
Dès la fin des années 50, la décolonisation mondiale prend de l’essor. De même que les idées, combats et guerres anticolonialistes et nationalistes. C’est dans ce contexte de rupture avec les tutelles coloniales qu’en 1958 la section guadeloupéenne du PCF devient le PCG.
C’est également dans ce contexte que l’UD-CGT décide de se constituer en centrale syndicale indépendante de la CGT française.
Depuis cette date, la CGTG a participé à de nombreuses luttes aux côtés des travailleurs dont certaines marquèrent l’histoire :
– La grève des ouvriers du bâtiment en mai 1967 qui s’est transformée en massacre sur ordre de l’État colonial français.
– La grande grève des travailleurs du bâtiment en 1971 pour des augmentations de salaire.
– La grève des plantations de banane en décembre 1997 et janvier 1998. Les ouvriers ont obtenu une prime de fin d’année de 4 000 francs, ce qui fait plus de 600 euros aujourd’hui, et le paiement de 50% des jours de grève.
– Une série de luttes dans les années 2000, pour l’application des 35 heures, entre autres à la Brinks, à l’ANPE (aujourd’hui Pôle emploi), au SDIS (les pompiers).
– La grève générale historique de 2009, pour les 200 euros et une série de revendications. La CGTG a dirigé le mouvement avec les autres organisations du LKP. Le 17 février, Jacques Bino, salarié des impôts et militant de la CGTG est abattu en revenant d’un meeting.
Plus récemment, il y a eu d’autres luttes marquantes :
– En juillet 2016, au Crédit agricole contre la tentative de suppression de la prime de vie chère,
– En 2017, dans la banane et en particulier sur la plantation Bois-Debout contre des conditions de travail quasi esclavagistes,
– De novembre 2018 à février 2019 à Milénis et Promocash contre le riche patron béké Despointes qui voulait baisser les salaires.
Aujourd’hui, la CGTG représente la deuxième force syndicale après l’UGTG (Union générale des travailleurs de Guadeloupe).
Mais après une montée d’adhésions suite à la grève générale de 2009, la CGTG souffre aujourd’hui comme tous les syndicats du recul de la syndicalisation. Mais vu les luttes actuelles, une remontée est possible.
Le syndicat, « l’école de la révolution »
Le syndicat est le premier pas que peut faire un travailleur vers la défense de ses intérêts au quotidien face au patronat exploiteur, vers sa formation, vers l’organisation de classe, vers l’apprentissage des luttes et l’acquisition d’une conscience de classe.
Cependant, la meilleure conscience de classe est celle qui amène le travailleur à ne pas considérer le syndicat comme un rouage social « un partenaire social », ce que veut faire de lui le patronat et certains syndicalistes. Mais au contraire comme un instrument de la lutte de classe la plus farouche possible. La bourgeoisie mène une guerre de classe toujours plus féroce contre les travailleurs. Ces derniers, dans cette guerre ont donc intérêt à alterner luttes défensives et luttes offensives contre leur ennemi jusqu’à l’offensive finale.
Car le but final de tout travailleur conscient doit être la destruction du système capitaliste qui l’exploite et détruit l’humanité. Pour ce faire la lutte purement syndicale ne suffira pas. Elle devra se transformer en lutte révolutionnaire pour la prise du pouvoir politique par les travailleurs. D’où la nécessité vitale pour la classe ouvrière de se forger son propre parti politique révolutionnaire.
La période que nous vivons actuellement ne va pas dans ce sens. Mais plus les travailleurs seront conscients de cette nécessité, plus ils renforceront leur conscience de classe, la feront partager très largement. Le syndicat peut préparer à l’acquisition de cette force mentale puis physique.
C’est en ce sens que, comme disait Lénine, le syndicat est l’école de la révolution.