CO N°1296 (19 novembre 2022) – Guadeloupe – La Route du Rhum : du pain et des jeux, et moins de pain

La Route du Rhum a été créée en 1978 à l’initiative d’un patron du sucre-rhum, Bernard Hass, pour promouvoir le rhum des Antilles. Elle a surtout bénéficié, jusqu’à aujourd’hui, aux gros capitalistes, qui en tirent profit grâce à la participation de fonds publics.

Tous les quatre ans, au mois de novembre, cette course transat-lantique part du port de Saint-Malo en Bretagne à destination de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. Cet évènement attire des milliers de visiteurs. De nombreuses animations sont prévues. Le président de la Région Guadeloupe, Ary Chalus, se félicite d’avoir investi près de sept millions d’euros, et affirme qu’il y aura des « retombées économiques très importantes pour la Guadeloupe ». Il a pris l’exemple des retombées de la précédente édition en 2018. Selon Chalus, la Route du Rhum a entraîné une croissance économique de 4 % et une baisse de 6 % du taux de chômage en 2019.

Interrogé sur les retombées possibles de la Route du Rhum, Chalus a hésité, puis s’est souvenu que Vial-Collet, grand patron de l’hôtellerie et des compagnies aériennes, les estimait à « des dizaines de millions ».

La Route du Rhum bénéficie ponctuellement à quelques petites marchandes ou à des petits commerçants qui vendent leurs produits. Mais ceux qui font le plus de bénéfices, ce sont les grands patrons de l’hôtellerie, des compagnies aériennes. La construction des voiliers coûte entre 17 et 20 millions d’euros. Ce n’est pas étonnant qu’une partie de la population remette en cause la Route du Rhum, autant d’argent public dépensé, alors que de nombreux problèmes demeurent : l’eau, les soignants suspendus, la pollution au chlordécone, la hausse des prix, le chômage, les bas salaires… De la même façon que les collectivités locales s’investissent dans la Route du Rhum, elles devraient mettre tous les moyens pour une « Route » de l’eau. Face à l’augmentation des prix et du chômage, les travailleurs et les chômeurs ont intérêt à se préparer à des luttes collectives pour exiger aussi une « Route » pour le plein emploi et pour la hausse des salaires.