Au mois d’octobre 2022, Ariel Henry avait sollicité l’aide de l’ONU pour l’envoi de troupes militaires en Haïti pour combattre les gangs, mais les pays sollicités, comme le Canada, traînent les pieds. Le premier ministre tente alors de mobiliser ses propres troupes.
Ainsi le vendredi 17 mars, il a visité les Forces armées d’Haïti (FADH) et a lancé un appel pour que les militaires viennent en renfort à la Police Nationale dans sa lutte contre les gangs armés pour rétablir la sécurité. Les FADH comptent actuellement environ 2 000 militaires formés par des experts en Argentine, au Mexique et en Colombie. Il n’a pas précisé à quel moment l’armée sera déployée ni son rôle. Mais ces militaires sont eux aussi impliqués dans les exactions contre la population, plusieurs chefs de gangs sont d’anciens militaires.
La situation générale se détériore, les affrontements entre les gangs s’intensifient. Les habitants d’un quartier populaire se retrouvent sous le feu de tirs nourris pendant des heures. Cela commence à l’aube et peut durer toute la journée. Dans le même temps, dans le quartier voisin les habitants survivent dans une ambiance moins tendue, jusqu’à ce qu’un gang décide de passer à l’action. La population des quartiers est à la merci des hommes armés. Le dicton de la survie est « prekosyon pa kapon » : « Prendre ses précautions ne veut pas dire être lâche ».
À Port-au-Prince les entreprises de la zone industrielle tournent au ralenti, plusieurs usines sont fermées. Pour ne pas payer la journée aux travailleurs qui arrivent à l’usine après avoir affronté les dangers de la rue, les patrons, prétextant qu’il n’y a pas de commande, font des mises à pied pour un, deux jours, voire une semaine. Ainsi pour une quinzaine de jours de travail prévue, le patron n’embauche que sept jours et rogne sur le salaire en ne payant pas les week-ends. Non, la mobilisation par le gouvernement des hommes en armes officiels n’est pas dans l’intérêt de la population pauvre.