Le vendredi 10 mars le gouvernement des États-Unis a décidé de fermer la Silicon Valley Bank (SVB) en grande difficulté. Cette banque californienne a connu des retraits massifs de ses clients. La fermeture de la 16 ème banque américaine a affecté d’autres banques américaines et européennes. La faillite de la SVB pourrait causer une grave crise financière mondiale.
La panique sur les marchés a commencé le 9 mars quand SVB a annoncé qu’elle cherchait à lever rapidement du capital pour faire face aux nombreux retraits de ses clients qui sont principalement des entreprises de nouvelles technologies. La banque a eu des difficultés à couvrir la perte occasionnée par ces retraits, causant son effondrement. Quelques jours plus tard, une autre banque, la Signature Bank de New-York, a aussi fait faillite. La Signature Bank était connue pour financer l’industrie de la cryptomonnaie. Cet évènement a eu des conséquences sur les quatre premières banques américaines (J.P. Morgan, Bank of America, Wells Fargo, Citi) qui ont perdu 52 milliards de dollars de capitalisation. Pour calmer les marchés, la banque centrale américaine (FED), le Trésor américain et la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) ont organisé à la hâte un plan de sauvetage. Mais entre-temps, la crise s’était déjà répandue en Europe. Les actions des groupes bancaires ont chuté elles aussi, le vendredi matin. Le titre de la Société générale a perdu 5,14 %, BNP Paribas 4,33 % et Crédit agricole 3,35 %. Il y a eu de gros retraits au Crédit Suisse, la deuxième plus grosse banque Suisse, et l’une des plus importantes banques au monde. Pour éviter la faillite, le gouvernement suisse et la banque centrale ont versé 50 milliards d’euros. Puis les pouvoirs publics ont contraint la banque concurrente UBS à racheter le Crédit Suisse pour trois milliards d’euros.
Croissance prodigieuse de la dette
Derrière cette panique se cache un système financier qui vit de plus en plus sur des dettes colossales. Chaque jour, des milliards de titres de dettes sont émis par les États, ces dettes s’achètent et se vendent sur les marchés. Les gouvernements multiplient les crédits bancaires. Ainsi, les États ont pu verser des centaines de milliards aux capitalistes, au moment du Covid, puis pour amortir la flambée des prix de l’énergie, favoriser la transition énergétique ou financer le réarmement. La dette mondiale a atteint le record de 226 000 milliards de dollars en 2020.
Beaucoup d’économistes et d’autres experts ont imputé la croissance de cette dette à la politique de l’argent facile de la Réserve fédérale américaine, ainsi que celles des banques centrales des autres pays. Ces banques centrales ont abaissé les taux d’intérêt pratiquement à zéro à la suite de la crise financière de 2008. Depuis les quinze dernières années de crédit facile, les milliers de milliards de dollars d’euros injectés dans l’économie ont très peu relancé les investissements productifs. Presque toute la dette est allée dans la spéculation. Cet argent facile a favorisé la spéculation boursière qui à son tour a entraîné l’inflation. Depuis un an, avec le retour de l’inflation et sous prétexte de la juguler, les banques centrales ont augmenté les taux d’intérêts. De mars 2022 à mars 2023, la FED a porté son principal taux de 0 % à 4,75 %. La banque centrale européenne (BCE) l’a suivie, portant son taux de 0 % en juillet à 3,5 % à la mi-mars. L’objectif des banques centrales était de « ralentir le marché » en réduisant la demande de tous les biens, produits manufacturés ou immobiliers, en espérant que les prix baisseraient.
Qu’en est-il de la régulation des marchés ?
Des politiciens et des responsables gouvernementaux ont appelé à davantage de régulation comme moyen de réduire le danger de toute une dette. Mais ce qu’on ne dit pas c’est que des dizaines de milliards de dollars de dettes ont été camouflées dans les parties non réglementées du système financier, parmi toutes sortes de fonds d’investissement, de prêteurs privés, de compagnies privées de fonds propres et de fonds spéculatifs. Une grande partie de cette dette prend la forme d’instruments spéculatifs très complexes, appelés produits dérivés. Ces produits dérivés sont une sorte de bombe de la dette. Lors d’une récession ces dérivés explosent, avec des pertes, se propageant à la vitesse de la lumière. C’est ce qui est arrivé pendant la crise bancaire des subprimes en 2008.
Combien de ces produits dérivés existent, même les gouvernements et les régulateurs officiels l’ignorent, car beaucoup de ces fonds s’opèrent sans être contrôlés par les gouvernements. On entend des voix rassurantes qui affirment que la faillite de la banque SVB n’allait avoir aucune conséquence sur les banques européennes. Mais dans un système aussi irrationnel que le capitalisme, une simple rumeur conduit à la faillite d’autres banques et donc à une grave crise. Ce n’est pas seulement le début d’une crise financière, mais d’une crise économique plus générale, un vrai désastre que les grands financiers vont faire payer à la classe ouvrière. Le rachat du Crédit Suisse par la banque UBS pourrait causer des dizaines de milliers de licenciements. Les États capitalistes prendront des mesures d’austérité pour réduire la dette. Ils imposeront des économies drastiques à tous les services publics utiles à la population. Ils réduiront les dépenses dans la santé, l’éducation, les transports etc. Des salaires et des pensions de misère menacent les travailleurs de toute l’Europe.
Ce qui est certain : aucune réforme ne changera le fonctionnement de ce système. Les crises sont inhérentes au capitalisme. Si l’on veut mettre fin à toutes ces crises, il faut abolir ce système. La seule classe sociale organisée, opposée aux intérêts de la bourgeoisie et qui est capable de le renverser, c’est la classe ouvrière.