Rodrigue Petitot, le leader du RPPRAC, l’organisation à l’initiative du mouvement actuel contre la vie chère en Martinique, a été arrêté le 12 novembre « pour violation de domicile, menaces, intimidation et violences sur des personnes dépositaires de l’autorité publique ». Des centaines de personnes sont venues le soutenir devant son lieu de détention jusqu’à sa sortie du tribunal le 15 novembre.
Les autorités soutenues par des médias traditionnels aimeraient imputer les violences et les pillages en marges du mouvement à ce leader. La lutte contre la vie chère en Martinique a gagné largement en popularité depuis bientôt trois mois. Les actions et manifestations se poursuivent en Martinique mais aussi dans l’Hexagone avec d’impressionnantes manifestations à Paris. En Guadeloupe, le 16 novembre, des personnes ont perturbé le fonctionnement d’un magasin Carrefour qui en plus de vendre des produits chers, ment sur les prix affichés.
Les leaders du RPPRAC ont débuté la mobilisation en exigeant la baisse des prix de l’alimentaire, et dénoncent le pouvoir des riches familles Békés et de quelques bourgeois de couleur sur la grande distribution aux Antilles. Rien que le Groupe Bernard Hayot a entre les mains les entreprises franchisées Carrefour, Renault, Mr Bricolage, Danone, Kia, Decathlon et bien d’autres. C’est un groupe, présent dans 19 pays dans le monde et dans l’ensemble de l’outre-mer, qui a réalisé un chiffre d’affaires de trois milliards d’euros en 2023.
Ces capitalistes se réservent des marges exorbitantes et se défendent de les révéler à la population.
De plus l’approvisionnement est majoritairement tributaire des importations depuis l’Hexagone, estimées à 87 % en 2023. L’entreprise CMA-CGM monopolisant l’import-export profite largement de cette situation pour s’enrichir.
Un protocole d’accord rejeté par les manifestants a été signé entre le préfet, la collectivité et les patrons de la grande distribution le 16 octobre. La baisse des prix y est largement insuffisante puisqu’on ne touche pas aux profits des gros possédants.
C’est le patronat qu’il faut faire payer au lieu de prendre sur l’argent public. Mais au-delà d’une baisse des prix significative, revendiquer la hausse des salaires est important !
Les dépenses réelles des classes populaires ont explosé. Il ne s’agit plus de la perte d’un peu de pouvoir d’achat, les salaires sont devenus très insuffisants pour vivre. En 2023, un économiste, Christian Louis-Joseph, rapportait que plus de la moitié de la population martiniquaise se trouve en situation de pau-vreté.
Il faut une augmentation conséquente pour tous les salaires, les allocations et les retraites. Pas moins de 600 € à commencer par les plus faibles. Qu’aucun revenu ne puisse être inférieur à 2000 €.
La lutte sociale en Martinique concerne une partie de la population mais les travailleurs ont tout autant intérêt à déclencher une lutte au sein des entreprises. Une lutte pour l’augmentation des salaires menée avec au moins autant d’acharnement que le mouvement de Rodrigue Petitot serait gagnante.
À l’image des dockers et des travailleurs d’EDF, qui, lorsqu’ils cessent leurs activités, stoppent l’acheminement des marchandises et la production d’électricité, on voit que les travailleurs sont indispensables pour faire tourner la société. Cette conscience chez les travailleurs qu’ils portent toute la société sur leurs épaules peut permettre d’aller loin.
Les milliers de salariés de la grande distribution aux Antilles s’ils décident de cesser le travail, pourraient bloquer la machine à sous des Hayot et consort. Les exploités sont les seuls à pouvoir contester le pouvoir des grands possédants. C’est de cette manière que la classe laborieuse est la mieux placée pour imposer ses revendications et arracher la hausse des salaires par les luttes massives et les grèves dans les entreprises.