En 1825, il y a tout juste 200 ans, Haïti a été forcée de payer une somme considérable à l’État français en échange de la reconnaissance de son indépendance. Cette ordonnance fut signée par le roi de France Charles X le 17 avril 1825.
Le 17 avril 2025, le jour du bicentenaire de l’ordonnance, Emmanuel Macron a fait une déclaration officielle.
Il y qualifie la rançon imposée par la France de « force injuste de l’Histoire », pour ensuite annoncer la création d’une commission franco-haïtienne d’historiens chargée d’évaluer l’impact du rançonnage. Une façon cynique de se débarrasser du problème ! Si vraiment il voulait faire quelque chose, il pourrait ne serait-ce que stopper les expulsions et régulariser tous les Haïtiens sur le territoire français.
Dans sa déclaration, le rôle de la grande bourgeoisie dans ce pillage est mis de côté. La rançon était pourtant bien destinée à indemniser les anciens planteurs.
Le débat est animé parmi des historiens et des intellectuels haïtiens, français et caribéens. Rapidement la critique a fusé car la déclaration n’avait pas mentionné la question des « réparations » vis-à-vis du préjudice subi par Haïti. Au paiement des 150 millions de francs or par Haïti s’ajoutent les nombreux emprunts, refinancements et intérêts payés aux banquiers de France et des États-Unis. Des travaux d’historiens, publiés en 2022 par le New York Time, ont estimé le préjudice entre 21 et 115 milliards de dollars pour Haïti entre 1825 et 1957.
Le gouvernement français n’envisage évidemment pas de payer pour ce préjudice. Pas même les 30 milliards d’euros réclamés il y a quelques années par l’État haïtien en guise de réparation. Et quand bien même, si l’État français entamait des négociations sur la question des réparations, que prendra-t-il en compte ?
Les dommages créés par la France en Haïti ne sont pas chiffrables. Avant la « double-dette » imposée, la bourgeoisie française et occidentale s’est développée sur le socle du système esclavagiste. Haïti, aujourd’hui l’un des pays les plus pauvres du monde, fut la colonie la plus riche du monde. L’exploitation esclavagiste permit l’essor de l’économie française. Dans sa déclaration Macron mentionne la révolution des esclaves haïtiens, il dit que ce combat « aurait dû offrir à la France et Haïti l’opportunité de faire chemin commun ». En guise de chemin commun, il y a eu la continuité du pillage de la population et l’enrichissement de la bourgeoisie.
Les esclaves se sont soulevés massivement, ils ont renversé le système de l’esclavage en 1794 et ont gagné leur indépendance en mettant en déroute l’armée napoléonienne en 1804. Mais le pays n’a jamais cessé de payer pour cette audace. Tout le poids du capitalisme mondial a pesé sur lui. Le préjudice est incommensurable.
La préoccupation de la population pauvre en Haïti n’est pas le débat sur les « réparations ». C’est sa survie qui la préoccupe. Les gangs dans leur ascension massacrent les habitants, pillent les quartiers. La nourriture manque, un million d’enfants sont menacés par la famine… Même si l’Etat français donnait quelques millions ou milliards, ils seraient détournés par des notables et des petits bourgeois en Haïti, et ne sortiraient pas la population de cette barbarie.
La réparation du préjudice c’est l’expropriation de tous ceux qui se sont enrichis sur des générations par l’exploitation esclavagiste, sur le pillage d’Haïti et sur la misère de la population laborieuse. La population totalement écrasée en Haïti n’aura pas d’autre choix que de s’en prendre aux gros possédants d’Haïti et surtout à la grande bourgeoisie impérialiste française et étasunienne. Le capitalisme ne pourra payer pour ses crimes qu’en étant exproprié complètement ! En Haïti et d’un bout à l’autre de la planète, c’est la suppression de la société d’exploitation de l’Homme par l’Homme et son remplacement par une société au service de tous qui pourra définitivement sortir l’humanité de la barbarie.