À l’aube du 25 octobre 1983, vers 5 heures du matin, plusieurs milliers de militaires américains ont débarqué à Grenade.
L’opération était de grande envergure : environ 7 000 soldats américains sont intervenus sur terre, dont plusieurs centaines originaires des Caraïbes durant les huit jours d’invasion. Les forces d’invasion comptaient des hélicoptères, une flotte de 10 000 marines qui patrouillaient en mer, des forces de déploiement rapide, comme les SEAS entraînés pour intervenir dans les airs, en mer et sur terre. Les 1 500 combattants armés grenadiens aidés de plusieurs centaines de Cubains, ne pouvaient tenir longtemps même s’ils étaient prêts « à résister jusqu’à la mort ». Le président américain de l’époque Ronald Reagan, avait lancé cette intervention, mentant publiquement en disant qu’il s’agissait de « libérer les 1000 citoyens américains sur place », de « libérer la population grenadienne de la dictature » ou encore de « rétablir l’ordre ».
De l’ascension à l’assassinat de Maurice Bishop
Grenade est une petite île de la Caraïbe, située au sud de l’arc des Petites Antilles. Elle comptait, en 1983, 110 000 habitants. Un régime militaire y exerçait le pouvoir depuis 1979, année où le dirigeant Maurice Bishop avait renversé le pouvoir dictatorial d’Éric Gairy. Maurice Bishop était apprécié de la population, son gouvernement avait instauré un fonctionnement plus démocratique qu’auparavant. Il avait permis à la population pauvre d’accéder à l’éducation et à la gratuité du système de santé. Malgré tout, les Grenadiens n’avaient pas le contrôle sur le pouvoir.
En octobre 1983, des conflits entre cliques au pouvoir débouchèrent sur l’assassinat de Maurice Bishop le 19 octobre 1983. Préparés par les USA ? La question reste posée.
Ce jour-là, de grandes manifestations de la population viennent libérer Bishop, alors retenu par ses opposants. Bishop et ses partisans vont être capturés et Bishop exécuté, un véhicule militaire tire également sur la foule faisant plusieurs morts.
Cette instabilité fut une belle occasion pour les États-Unis d’intervenir face au peuple de cette île qui échappait à leur domination. En effet, à l’époque de la dictature de Gairy, marquée par l’analphabétisme, la misère et l’absence de libertés démocratiques, les États-Unis y trouvaient un gouvernement à sa botte. À partir de la prise de pouvoir de Maurice Bishop les États-Unis refusèrent l’aide économique à Grenade. Bishop trouva cette aide auprès de Cuba et de l’URSS. En plein contexte de Guerre froide, et plus de 20 ans après la défaite à Cuba, il n’était pas envisageable pour l’impérialisme américain qu’un autre territoire des Caraïbes, aussi petit soit-il, puisse se rapprocher du camp de la bureaucratie soviétique.
Sous Bishop la population soutenait le régime, l’armée US ne pouvait intervenir militairement sans difficultés. Après le 19 octobre, la population est choquée et désarmée moralement. Une faille s’ouvre.
Ce n’est donc pas pour « libérer la population grenadienne » que Reagan a envoyé ses soldats tirer sur cette même population. Ni même pour faire face à une pseudo base militaire russo-cubaine qui aurait menacé les USA, du fait du rapprochement entre le gouvernement militaire grenadien et Fidel Castro.
L’expédition à Grenade était pour les États-Unis, un moyen de donner une leçon à tous les peuples de la Caraïbe et au-delà.
Ils devaient contrôler les Amériques directement. En pleine guerre froide entre l’impérialisme américain et l’URSS, les USA montraient leur force. Il n’y aurait pas de nouveau Cuba dans cette zone. C’était un avertissement aussi au Nicaragua, aux guérillas d’Amérique latine, un avertissement destiné à décourager tous ceux qui seraient tentés de se dresser contre l’impérialisme américain.
Huit ans après la défaite du Vietnam, la victoire des États-Unis sur Grenade fut aussi un moyen de redorer leur blason, un moyen pour que le peuple américain accepte et se prépare aux futures expéditions militaires.