Depuis plusieurs jours les abords des lieux où Biden prêtera serment à Washington sont encerclés par l’armée. Le gouvernement craint de nouvelles manifestations des partisans de Trump. Après celle du Capitole, l’extrême droite est maintenant une réelle menace. C’est dans une ambiance de forteresse assiégée ultra sécurisée que le chef de l’impérialisme mondial prêtera serment. Belle image du « monde libre ».
Nous reproduisons ci-dessous des extraits de l’éditorial du 11 janvier de nos camarades de Lutte ouvrière ainsi que des extraits de l’éditorial de l’organisation trotskyste américaine The Spark (L’étincelle) publié le 10 janvier.
L’extrême droite au Capitole, un avertissement pour les travailleurs
Les images des activistes d’extrême droite envahissant le Capitole à Washington le 6 janvier, ont stupéfié le monde entier. Voir un président sortant refuser sa défaite électorale et appeler ses partisans à marcher sur « l’Assemblée du peuple » était, jusque-là, le triste privilège des dictatures de pays pauvres. Cette fois, cela s’est produit dans la première puissance impérialiste mondiale.
Alors oui, cela doit nous faire réfléchir, et d’autant plus que le mal qui ronge les États-Unis existe aussi ici, en France : la montée des courants identitaires d’extrême droite, racistes et xénophobes, dangereux pour le monde du travail.
Ces courants ont toujours existé aux États-Unis. Le Ku Klux Klan a assassiné des Noirs et terrorisé la population dans les États du sud des décennies durant. Mais aujourd’hui, les groupes qui se multiplient, y compris sur des bases complotistes nouvelles, ne sont pas seulement les fruits du passé raciste, ils sont dopés par la crise économique, sociale et sanitaire.
Aux États-Unis, comme partout, les fermetures d’entreprises, le chômage et la misère se sont aggravés depuis la crise financière de 2008. La peur du déclassement, la haine vis-à-vis de l’élite au pouvoir, le repli national, identitaire et religieux conduisant à l’invention de boucs émissaires, se sont renforcés.
L’envahissement du Capitole n’a été le fait que de quelques centaines de personnes et, s’il a occasionné des morts, il a pris un aspect carnavalesque. Mais ce qui est aujourd’hui une comédie peut se transformer rapidement en tragédie parce que, derrière les déguisements et les postures ridicules, il y a des femmes et des hommes convaincus de la supériorité de la race blanche.
Trump a une responsabilité évidente dans ces évènements. Mais les réduire à sa personnalité et à son avenir politique revient à se voiler la face. Les forces sociales et politiques qu’il a renforcées existent indépendamment de lui.
Nombre de dirigeants, à l’instar de Macron, en ont appelé aux institutions et à la démocratie. Comme si la subversion n’était pas venue du cœur même des institutions, du haut de la présidence, de l’intérieur du Parti républicain ! L’action, ou plutôt l’inaction, de la police montre aussi que le ver est dans le fruit.
Alors que la police est sur le pied de guerre et a la gâchette facile face aux manifestants noirs ou antiracistes, on l’a vue, au Capitole, surprise, complaisante, voire complice. Certains assaillants étaient, eux-mêmes, d’anciens militaires et policiers.
Ce qui s’est passé au Capitole restera peut-être un avertissement sans conséquence. Mais les ingrédients pour le développement d’une extrême droite fascisante sont là.
La même crise du capitalisme et de son système politique frappe partout et entraîne la montée des démagogues d’extrême droite. Une force politique qui accéderait au pouvoir en mettant en action ces courants aux idées réactionnaires serait un pouvoir anti-ouvrier et dictatorial.
Les travailleurs n’ont pas à sous-estimer le danger et ils ont encore moins à rester spectateurs. Ils doivent se préparer à y faire face, moralement et politiquement, en s’organisant sur la base de leurs intérêts et de leurs perspectives de classe.
La suprématie blanche a relevé sa tête hideuse
Des gangs de suprémacistes blancs ont pénétré dans le Capitole avec des drapeaux confédérés, des drapeaux Trump et des slogans racistes. Le Ku Klux Klan nouvelle manière était déguisé en Proud Boys (les fiers garçons), 3%ers (les Trois pour cent), en nazis américains, en QAnon, en milice du Michigan et d’autres groupes paramilitaires. Parmi eux, des flics ou des militaires qui ne sont pas en service venus de Californie, de l’Illinois, de Pennsylvanie et d’autres États.
Ces gangs étaient déjà passés à « l’action ». En décembre, alors que les électeurs du collège électoral se réunissaient dans tous les États pour voter, certains de ces voyous d’extrême droite avaient défilé dans un quartier de Washington, entourant les gens qu’ils rencontraient, dégradant des églises noires.
En mai, des gangs de miliciens avaient envahi la législature du Michigan, hissant leurs armes pour faire une démonstration de force. En été, les Proud Boys et les Boogaloo Bois avaient organisé des caravanes de camions à Portland, dans l’Oregon, avec des armes d’épaule brandies par les fenêtres. D’autres gangs avaient attaqué des manifestants anti-racistes de Black Lives Matter (Les vies noires comptent) à Louisville et Kenosha. Des gens ont été tués dans l’altercation.
Toute personne rationnelle, regardant les publications de ces groupes sur les réseaux sociaux, se serait préparée à une attaque le 6 janvier. La police de Washington et les autorités policières fédérales ne l’ont pas fait. Elles auraient tout aussi bien pu inviter les bandes de maraudeurs à entrer et à se sentir chez elles au Capitole.