Le 7 septembre les dirigeants politiques de Martinique, Guadeloupe, Guyane, Saint-Martin, La Réunion, Mayotte ont rencontré Macron, en réponse à l’appel de Fort-de-France, publié en mai, dans lequel ces élus ont demandé « un changement profond de la politique outre-mer de l’État ».
À leur sortie de l’Élysée, les représentants des Outre-mer étaient contents. Letchimy, le président de la CTM (Collectivité territoriale de Martinique) s’est dit « très agréablement surpris de l’esprit d’ouverture ». Son collègue Chalus, président de la Région Guadeloupe, a déclaré : « Nous sommes très satisfaits, parce que nous voulions être reçus par le président de la République et c’est chose faite ».
Ni l’un ni l’autre n’ont expliqué en quoi consiste le « changement profond » qu’ils réclament. Derrière les grandes phrases sur la co-construction et le dialogue, le flou est complet concernant un éventuel changement du statut de nos territoires.
Si les élus d’Outre-mer ne disent rien sur leur projet, c’est parce qu’en fait ils n’en ont pas. Ils disent vouloir établir de nouvelles relations entre l’Outre-mer et la France, mais en réalité ils se plieront au projet de Macron et de l’État français.
Le gouvernement a prévu de réviser la constitution en 2023. Il a déjà renforcé l’autonomie des régions vis-à-vis de l’État, avec la loi « 3DS » votée en février 2022, c’est-à-dire « différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification ».
Cette loi concerne toutes les régions, pas seulement les Outre-mer. L’objectif du gouvernement est de se désengager financièrement, en obligeant les collectivités à assumer toujours plus de missions dans les transports, l’éducation, la santé, etc.
Cette loi prévoit même « d’étendre le pouvoir réglementaire des collectivités à de nouveaux domaines ». Les dirigeants d’Outre-mer disent qu’ils veulent plus de pouvoir local ? L’État français l’a déjà prévu ! Mais ce pouvoir ne sera pas bien grand, car la même loi prévoit d’accentuer le poids du préfet à plusieurs niveaux…
Avec leur grand appel au changement, les élus de Guadeloupe, de Martinique et des autres territoires d’Outre-mer veulent juste montrer qu’ils font quelque chose. Comme l’a expliqué Chalus, ils souhaitent « redonner confiance à notre population, les encourager et qu’ils retournent aux urnes ». L’abstention record aux dernières élections locales apparaît en effet comme un désaveu de l’action des dirigeants politiques en place.
L’appel de Fort-de-France pose un constat, celui du « mal-développement » et des « inégalités de plus en plus criantes » dans les Outre-mer. Mais ce n’est pas un aménagement politico-administratif, un changement de statut plus ou moins prononcé, qui améliorera le sort des exploités et des pauvres si cette évolution se décide sans eux. Il faudra que les travailleurs et les couches populaires s’imposent et affirment leur existence politique pour faire valoir leurs propres intérêts.
Car si les élus locaux n’ont pas de projet, ce n’est pas le cas des gros capitalistes et du gouvernement à leur service. Leur plan, c’est de continuer à faire payer la crise aux classes populaires. En plus de l’inflation galopante, de nouvelles hausses des prix se profilent, comme pour l’électricité qui devrait augmenter de 15 % l’an prochain.
En mettant ainsi la population au pillage, les riches accumulent toujours plus d’argent. Entre avril et juin 2022, les grandes entreprises françaises ont versé à leurs actionnaires des dividendes records de 44 milliards d’euros. Pour en finir avec les inégalités et le retard de développement des Outre-mer, quel que soit leur statut, ce sont ces milliards qu’il faudra récupérer.