Le 12 juin 1973 débute l’occupation de l’usine horlogère Lip à Besançon par les ouvriers en grève. Pendant des mois, pour protester contre la fermeture de leur usine et les plans de licenciements, les ouvriers et ouvrières surnommés les « Lip », se mettent en grève et relancent la production pour leur compte. Ils fabriquent, vendent les montres et s’assurent de leur paye jusqu’à la fin du conflit en 1974.
Lorsque le patron de l’usine Lip dépose le bilan en avril 1973, les ouvriers font un premier débrayage. Le 12 juin, les travailleurs découvrent que la direction prévoit 480 licenciements, ils occupent l’usine sur le champ et cachent les stocks de montres. Le 15 juin, 12 000 personnes manifestent à Besançon contre les licenciements. Le 18 juin, dans l’assemblée générale des ouvriers, la décision est prise de relancer la production, contrôlée exclusivement par les ouvriers. Un slogan apparait devant l’usine « On fabrique, on vend, on se paye » ! Ils s’assurent ainsi leur première paye le 2 août 1973. La grève est de plus en plus populaire et le gouvernement se décide à intervenir par la force. Le 14 août 1973 le ministre de l’Intérieur envoie les CRS pour évacuer l’usine. Après cet épisode les travailleurs d’autres usines aux alentours entament des mouvements de grève. La solidarité avec les ouvriers de Lip est à son apogée le 29 septembre 1973, quand 100 000 personnes viennent manifester dans la petite ville de Besançon !
Le mouvement d’occupation durera jusqu’au 29 janvier 1974 avec la signature d’un accord sur la reprise de l’usine avec l’ensemble du personnel. La plus grande victoire de ce mouvement aura été la capacité des ouvriers à franchir le pas pour se payer sur le fruit de leur travail, sans patrons ni maîtres. Ce combat fut un symbole de la lutte des travailleurs contre les fermetures d’usines dans les années 1970.