CO N°1310 (15 juillet 2023) – Il y a 60 ans : Martin Luther King et la marche sur Washington

Le 28 août 1963, Martin Luther King, dirigeant du mouvement des droits civiques, prononce son célèbre discours « I have a dream », devant le Lincoln Mémorial à Washington, et devant 250 000 personnes en grande majorité noires. Il s’agissait de « la Marche pour l’emploi et la liberté ».

Le contexte racial aux États-Unis

Dans les années 1870, quelques années après l’abolition de l’esclavage, la ségrégation officielle est appliquée dans les États du Sud des États-Unis, puis en 1912 dans les États du Nord.

La ségrégation officielle fut une des formes d’oppression raciste contre les Noirs américains. Cette ségrégation allait du salaire, plus faible pour les Noirs, à bien d’autres tels les espaces publics et jusqu’aux toilettes publiques séparées.

Il faut ajouter à cela, la violence physique que subissait la population noire de la part de la police, mais aussi d’une grande partie de la population blanche raciste, surtout dans le sud. Entre 1877 et 1950, 4 000 Noirs ont été lynchés. Ce qui représente un par semaine. Il n’était pas rare de retrouver un Noir abattu, ayant été mutilé, brulé ou encore pendu.

Dans l’État du Mississippi en 1955, Emmet Till, un jeune homme de 14 ans, est accusé d’avoir abordé une femme blanche. Le mari de cette femme et son demi-frère ont mutilé le corps d’Emmet Till en lui arrachant les yeux, en lui tirant dessus, en attachant du fil barbelé autour de son cou. Ensuite ils l’ont jeté encore vivant dans une rivière. Son visage était complètement défiguré. La mère d’Emmet Till a organisé des funérailles publiques pour que tout le monde puisse voir le corps de son fils lynché par des racistes. 50 000 personnes en colère ont assisté à ces funérailles. Ce ne fut pas un cas unique.

Martin Luther King et le mouvement des droits civiques

C’est dans ce contexte que Rosa Parks est arrêtée le 1er décembre 1955 à Montgomery dans l’État de l’Alabama pour avoir refusé de céder sa place à un Blanc. S’en est alors suivi le mouvement de boycott des bus de Montgomery, par la population noire, pendant 381 jours. La répression fut brutale, notamment par des arrestations. Mais la population noire a continué de boycotter les transports ce qui obligea la Cour Suprême à interdire la ségrégation dans les transports municipaux. Le boycott de Montgomery a été pour bon nombre de Noirs, un exemple de lutte non-violente et le coup d’envoi du plus grand mouvement de masse noir dans les Amériques.

Cette forme de lutte pacifique, Martin Luther King en fera son modèle de lutte contre l’oppression des Noirs durant le mouvement des droits civiques. Il prônait la lutte contre le racisme par la non-violence et l’action de masse.

Martin Luther King devint populaire lorsqu’il apporta son soutien à Rosa Parks et au mouvement de boycott des bus de Montgomery. Il était Pasteur et issu de la petite bourgeoisie noire. Depuis l’esclavage, les églises étaient les seuls endroits où les Noirs se réunissaient, transformant les églises en lieu où ils pouvaient discuter de leur oppression. Les églises ont alors été des lieux propices à la montée de la révolte des Noirs américains.

De nombreux boycotts, de manifestations et de sit-in sont organisés. En 1960, des étudiants de Greensbro en Caroline du nord se sont assis à un comptoir où on ne servait que des Blancs. En quelques jours ils ont été connus et 70 000 étudiants participèrent à ce genre d’action dont 3600 furent arrêtés par la police. À partir de 1961, des Blancs et des Noirs ont commencé à voyager ensemble vers le Sud, à utiliser les mêmes toilettes, les mêmes cafétérias. Ils se faisaient attaquer par des gens du Ku Klux Klan et la police fermait les yeux.

Martin Luther King organisait des manifestations de masse très populaires et médiatisées. La plus célèbre fut la marche pour l’emploi et la liberté, le 28 août 1963, à Washington. C’est alors que Martin Luther King fit son célèbre discours « J’ai un rêve » (« I have a dream »). Il était le porte-voix des opprimés noirs. Le Congrès adopta en urgence des lois pour les droits civiques. Mais de l’adoption de lois à leur mise en œuvre, il y a un fossé. Pendant toutes les années 1960, les Noirs ont dû continuer à lutter.

Malgré son idéologie de la non-violence, Martin Luther King était craint des autorités et des organisations racistes telles que le Ku Klux Klan qui posa des bombes chez lui. Les autorités, notamment le FBI, menaçaient Martin Luther King et d’autres militants de la cause noire pour les déstabiliser.

Si le gouvernement et le Congrès américains firent adopter des lois pour les droits civiques, c’est parce qu’elles leur furent imposées par la révolte massive des Noirs. Le gouvernement craignait que le mouvement noir devienne une menace pour l’ordre établi.

D’autant que des organisations et leaders noirs plus radicaux prônaient l’auto défense armée des Noirs. Le mouvement du Black power puis des Black panthers devinrent très populaires.

Ce sont là les causes qui conduisirent à l’assassinat de Martin Luther King, le 4 avril 1968 au Lorraine Motel à Memphis dans le Tennessee.

Le jour même, et les jours suivants, les émeutes parties des ghettos noirs des grandes villes américaines enflammaient le pays.