L’église catholique de Martinique est dans la tourmente. En cause, l’homélie d’un curé officiant à l’église des Trois-Ilets dimanche 19 mai.
Pour expliquer à l’assistance les raisons de la mobilisation des Kanaks contre le dégel de la loi électorale, le curé a parlé d’un problème de « jalousie », de « complexes découlant de l’esclavage ». Il est même allé jusqu’à évoquer « leur penchant pour l’alcool ». Parlant de la diversité de l’assistance en face de lui, il a observé « une assemblée composée de métropolitains, de Békés et… des autres ». Avant de remplacer « autres » par « nègres » pour ne pas dire « Antillais » car selon lui « les Békés sont aussi des Antillais ». Manifestement, pour dévoiler son comportement et ses propos racistes, il n’a pas attendu de boire le vin qui aurait pu lui servir d’excuse. Face au tollé que ces déclarations ont déclenché, sa hiérarchie l’a désavoué.
En fait, depuis 170 ans, la France, qui occupe les terres des Kanaks, veut rendre ces derniers minoritaires dans leur pays. Voilà ce que déclarait en 1972 Pierre Messmer, ancien légionnaire et ancien premier ministre de Pompidou : « La présence française en Calédonie ne peut être menacée, (..), que par une revendication nationaliste des populations autochtones (…). À court et moyen terme, l’immigration massive de citoyens français métropolitains ou originaires des départements d’outre-mer (Réunion) devrait permettre d’éviter ce danger en maintenant et en améliorant le rapport numérique des communautés. À long terme, la revendication nationaliste autochtone ne sera évitée que si les communautés non originaires du Pacifique représentent une masse démographique majoritaire. Le succès de cette entreprise indispensable au maintien de positions françaises (…) dépend, (…) de notre aptitude à réussir enfin, après tant d’échecs dans notre Histoire, une opération de peuplement outre-mer ». Dit autrement, il s’agit de « remplacer » une population par d’autres.
Après des révoltes kanakes dans les années 80 pour dénoncer et contrer cette opération, les gouvernements français et les partis indépendantistes kanaks s’étaient mis d’accord pour déterminer les conditions de participation aux élections portant sur l’accession à l’indépendance. Mais les derniers scrutins sur la question ayant montré une progression des partisans de l’indépendance, Macron veut modifier les accords pour assurer les colons français qu’ils garderont leur domination sur ces terres. Bien entendu, l’homme d’église le sait, mais, en fidèle et bon serviteur des riches colons et du système, il se tait et choisit de dénigrer les Kanaks.
Ces déclarations montrent que dans cette société se dissimulent des individus qui, sous couvert de prêcher la tolérance et l’amour du prochain, sont en réalité de fervents défenseurs du maintien du système de domination et d’exploitation de la société capitaliste. Notamment dans les colonies françaises.