À l’image de la catastrophe guerrière actuelle sur son territoire, le Liban s’est toujours trouvé au cœur des crises de la région du Moyen-Orient. Une région déchirée, divisée par l’impérialisme. Le Liban est surtout une création coloniale de la France qui est responsable d’une crise durable qui a maintenu la population dans la pauvreté et les conflits.
À l’époque de l’Empire ottoman, le Liban et la Syrie n’étaient pas des pays séparés. Le Liban correspond au nom de la région montagneuse au nord-est de Beyrouth, sa population est composée d’une large variété de minorités confessionnelles : chrétienne, orthodoxe, sunnites, chiites…
La colonie française
Lors de la Première Guerre mondiale, les puissances impérialistes hâtèrent la fin de l’Empire ottoman. La France et l’Angleterre se partagèrent la région dans l’ accord secret de Sykes-Picot en 1916. Après la guerre la France obtint un « mandat » sur ce qui correspond à l’actuel Liban et à la Syrie. Les frontières créées divisèrent des peuples. La France créa le « Grand Liban », un petit territoire de 10 400 km2, se basant principalement sur la présence majoritaire des chrétiens maronites dans la région. Les autres minorités religieuses se retrouvaient ainsi marginalisées.
La France institutionalisa les divisions confessionnelles au Liban. Le citoyen était défini en fonction de sa religion, les sièges de député étaient répartis en fonction de l’importance théorique des différentes communautés religieuses… De cette façon, en opposant le Liban et la Syrie et en divisant les minorités au sein du Liban, l’impérialisme français comptait contrôler sa colonie.
Pendant ce temps, Beyrouth fut le siège d’échanges coloniaux profitables pour la bourgeoisie. Grâce à son port et à la présence des grandes banques françaises, Beyrouth devint la principale place financière et commerciale de la région. Les entreprises françaises en firent leur porte d’entrée au Moyen-Orient, une région essentielle pour l’économie mondiale au vu des gisements de pétrole.
Après la deuxième Guerre mondiale, vint la naissance du nouvel État d’Israël, allié et surtout futur gendarme de l’impérialisme américain dans la région. C’est le début des guerres successives entre Israël et les États arabes de la région en vue de mater la résistance palestinienne.
Quinze ans de guerre civile
Après la proclamation de l’État d’Israël, des centaines de milliers de Palestiniens chassés de leurs terres s’étaient réfugiés au Liban. Les réfugiés s’organisaient politiquement et militairement. En 1975, le Parti chrétien des « Phalanges », d’extrême droite, déclencha l’affrontement avec les Palestiniens refugiés au Liban. Ces évènements menèrent à la guerre civile opposant le camp de l’extrême droite chrétienne et ceux qu’on appela les « islamo-progressistes », les milices palestiniennes, des partis de gauche ainsi que des partis nationalistes de la bourgeoisie musulmane.
La population libanaise a payé le prix de la politique de division entre les communautés religieuses. La guerre civile dura 15 ans, jusqu’en 1990. En 1982, Israël occupa le sud du Liban avec son armée. Elle parvint à y déloger les milices palestiniennes. En septembre 1982, les milices phalangistes, profitant de la fuite des organisations armées palestiniennes, massacrèrent plusieurs milliers de civils palestiniens en moins de deux jours dans les camps de Sabra et Chatila.
Ces évènements firent surgir, en réaction, un nouveau parti chiite : le Hezbollah.
Une instabilité profitable à l’impérialisme
Après la guerre civile, la classe politique au pouvoir, au nom de la « reconstruction » prit bien soin d’arroser les différents dirigeants de clans du pays. Un grand centre des affaires fut créé au centre de Beyrouth, la corruption et le clientélisme s’installèrent aussi durablement. Aucune politique ne fut profitable à la population.
La situation du pays ne fut jamais stable. Les raids et les bombardements israéliens se sont répétés entre 1996 et 2000, puis ceux de la guerre de 2006 d’Israël contre le Hezbollah, jusqu’au pilonnage d’aujourd’hui en 2024 où des milliers de Libanais meurent avec la complicité des puissances américaines et françaises. La population pauvre subit toutes les crises successives : les conséquences de la guerre en Syrie, les plans d’austérité à cause des dettes faramineuses, liées en partie au pillage par les banques françaises. L’explosion du port de Beyrouth en 2020 montra encore l’incurie et la corruption des classes dirigeantes…
Il y a bien eu des oppositions des classes populaires mais sans aucune politique qui puisse véritablement défendre leurs intérêts. Actuellement chaque faction armée mène sa propre politique nationaliste. C’est une impasse pour les masses pauvres. La division entre communautés exploitées, la construction d’une politique absurde héritée du colonialisme français, les pressions et les interventions militaires de l’impérialisme et des puissances régionales maintiennent ce petit territoire dans une extrême instabilité. Pour s’émanciper les travailleurs et les masses populaires n’auront pas d’autre choix que d’avoir leur propre organisation totalement indépendante des nationalistes. Une organisation s’appuyant sur une base communiste et révolutionnaire. Il n’y a pas d’autre voie pour l’émancipation des travailleurs et des masses populaires.