CO N°1340 (21 décembre 2024) – Jamaïque – Décembre 1831 : la grande révolte des esclaves

Également connue sous les noms de « Rébellion de Noël » ou « Baptist War », cette révolte a mobilisé plus de 60 000 esclaves qui exigeaient la liberté. Dirigée par un prédicateur (diacre) baptiste noir, Samuel Sharpe, la révolte dura 11 jours du 25 décembre 1831 au 4 janvier 1832.

D’abord habitée par les Taïnos, un peuple Arawak, pendant près de 2 500 ans, l’île de la Jamaïque fut colonisée par les Espagnols après le débarquement de Christophe Colomb en 1494 avant de devenir officiellement britannique en 1670. Quasiment tous les Taïnos ont été décimés par des maladies et des mauvais traitements de la part des colons.

Comme beaucoup d’autres îles des Antilles, la Jamaïque était une terre d’esclavage. Des Africains y ont été déportés et mis en esclavage pour la production de sucre de canne destinée au commerce d’abord de l’Espagne puis de la Grande-Bretagne.

En 1831, on compte près de 300 000 esclaves noirs sur l’île. Du fait de la religion protestante installée par des missionnaires anglais, certains Noirs sont devenus eux-mêmes des prédicateurs.

À la fin de l’année 1831, les esclaves suivaient les progrès du débat pour l’abolition de l’esclavage dans les colonies britanniques. Ils avaient espoir qu’un décret d’abolition arriverait bientôt. Mais ce ne fut pas le cas.

Les esclaves membres de plusieurs communautés baptistes noires décidèrent d’arrêter le travail sur les plantations pour exiger plus de liberté et un salaire égal à celui en vigueur à l’époque.

Samuel Sharpe, le leader baptiste, utilisa sa liberté de déplacement, lors des fêtes traditionnelles ou des services religieux, pour discuter et planifier la révolte avec ses partisans.

La rébellion éclata à l’estate Kensington près de Montego Bay lorsque les planteurs refusèrent de répondre aux exigences des insurgés. Les insurgés passaient de plantation en plantation pour étendre la rébellion. Des champs de canne à sucre et des plantations furent incendiés. Les Blancs fuyaient vers d’autres localités.

Une troupe armée de plusieurs milliers de Noirs appelée le Black Regiment, rejoignit la rébellion. À sa tête, un esclave connu sous le nom de Colonel Johnson. Ce régiment noir combattit contre une unité de la milice locale blanche le 28 décembre. Cette dernière se replia à Montego Bay.

D’autres régiments noirs se formèrent. L’un d’entre eux, composé d’environ cent cinquante rebelles, attaqua les troupes blanches à l’extrémité ouest de l’île.

La rébellion de Noël prit fin officiellement durant la première semaine de janvier 1832 lorsque la répression s’abattit. Mais une résistance sporadique se poursuivit pendant encore deux mois, les rebelles ayant recours à des tactiques de guérilla dans les montagnes de la Jamaïque. À la fin des combats, quatorze blancs furent tués contre 207 esclaves insurgés.

Plus de 300 hommes et femmes esclaves furent exécutés dont Samuel Sharpe qui fut pendu.

Cette rébellion fut l’une des plus grandes révoltes d’esclaves de la Jamaïque et même des Antilles. Elle joua un rôle dans l’abolition de l’esclavage par la Grande-Bretagne dans toutes ses colonies en 1838.