Le 12 janvier 2010 un tremblement de terre de magnitude sept ravageait Port-au-Prince et ses environs. La population pauvre qui a été la plus touchée vit toujours dans des conditions insupportables.
La secousse a entrainé la mort de plus de trois cent mille personnes et fait autant de blessés. Des quartiers populaires ont été rasés par l’onde de choc, des centaines de milliers de logements, d’écoles se sont écroulés. Près de deux millions d’habitants se sont retrouvés sans abri. Les gravats obstruaient les rues de la capitale et les survivants se réfugiaient sur les places fuyant les maisons dangereusement instables. Sur ces places ils ont construit des camps de tentes en attente d’un relogement qui ne vint jamais. De nombreuses maisons fissurées ont été laissées à l’abandon à Port-au-Prince et dans les villes de province touchées par la catastrophe. Le gouvernement de Martelly a fait expulser les sinistrés qui vivaient sous les tentes sur les places, les écoles et autres terrains de football. Chassés des camps, ils sont revenus vers les anciens bidonvilles et en ont construit de nouveaux qui se sont développés au nord de Port-au-Prince : Canaan, Jérusalem etc., de nouvelles cités insalubres et dépourvues de toute infrastructure sanitaire. Par ailleurs il existe encore des camps de tentes sur certains terrains où les propriétaires n’ont pas expulsé les sinistrés.
Pendant ces onze ans, plusieurs secousses sismiques de faible intensité ont été enregistrées sans faire de victimes comme en janvier 2010. Mais chaque épisode provoque des frayeurs dans la population qui ne connait pas les attitudes à adopter en cas de tremblement de terre.
Les gouvernements, comme celui de Jovenel Moise se succèdent sans initier de plans de mesures préventives face aux risques sismiques, sans ordonner et surveiller les constructions dans le respect des normes parasismiques. Il n’y a pas de programme d’information et de formation en direction des populations pauvres ou des zones plus éloignées.
Onze années après, cette population sinistrée n’a pas reçu l’aide qui était promise par les donateurs internationaux. Les milliards de dollars ont disparu dans les trafics organisés par les responsables successifs corrompus. Certaines ONG, les patrons de la sous-traitance et les autorités de l’État haïtien se sont servis en détournant les aides tant matérielles que financières destinées au secours des victimes du séisme. Si des banques, des hôtels de luxe, des supermarchés ont été rebâtis, la reconstruction annoncée par les gouvernements successifs n’a pas vu le jour dans les quartiers pauvres où les habitants se sont débrouillés pour bâtir autour des ruines. Ce qu’ils ont obtenu, c’est ce qu’ils ont arraché à travers leur luttes.
Le tremblement de terre est une catastrophe naturelle imprévisible, certes, mais les dégâts, les pertes en vie humaine, les blessés pourraient être minimisés ou évités. En Haïti le séisme se double d’une catastrophe sanitaire, d’une exacerbation de l’exploitation des travailleurs. Tout cela avec un semblant d’État qui est au service des nantis et ne se préoccupe pas de la situation de la majorité de la population, la plus démunie et la plus exposée. La mobilisation puissante de cette majorité est nécessaire pour pousser l’État à prendre des mesures d’urgence.