CO N°1276 (18 décembre 2021) – Éditorial – État méprisant, élus impuissants. Ils ne laissent place qu’à la révolte !

La crise sociale de Martinique et de Guadeloupe est profonde. Une première phase explosive a duré près de trois semaines. Cette explosion sociale est partie de la protestation contre l’obligation vaccinale et le passe sanitaire. Elle a très vite soulevé d’autres problèmes tels que le chômage chez les jeunes, la vie chère, le manque d’eau, le travail précaire, les bas salaires, le manque de transports, le manque de moyens pour la santé, l’empoisonnement au chlordécone, etc.

La colère s’est manifestée par des grèves, des blocages de zones d’activité économique importantes, et surtout par des barrages routiers. La nuit, des jeunes allaient affronter les gendarmes. Certains jeunes sont allés jusqu’à tirer sur eux. L’État a décidé d’envoyer des troupes supplémentaires, dont ceux du GIGN (Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale) et du RAID. Les barrages routiers ont été levés avec difficulté par l’armada policière, des jeunes ont été interpellés sur les barrages. Certains écopent de prison ferme.

Comme à son habitude, l’État répond à la détresse sociale par le mépris et la répression. Le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, venu en Guadeloupe, a demandé au collectif d’organisations en lutte de condamner les violences pour pouvoir négocier avec l’État. Comme si ils devaient se mettre à genoux et demander pardon à l’État. Inconcevable ! Même les élus locaux ont été hautainement renvoyés à « leur responsabilité ». L’État a balayé d’un revers de main toutes les possibilités de discussions. Voilà tout le mépris qu’il a pour les organisations, les élus et la population. Cette attitude méprisante et coloniale de la France en Guadeloupe et Martinique nourrit rancœur et colère chez des milliers de travailleurs et de pauvres.

Des discussions ont commencé entre le collectif d’organisations et les élus. Ces derniers les ont quittées en Guadeloupe, prétextant l’absence de l’État. En Martinique, les discussions par « atelier » tournent autour du pot.

Qui sème la misère, récolte la colère. Et la colère est bien là. Des centaines de soignants, pompiers, sont sans salaire et sans autre revenu, la population ne peut plus être soignée correctement en pleine pandémie, la jeunesse est sans perspective d’avenir et la vie devient de plus en plus chère. Si les dirigeants répondent par le mépris et n’apportent pas de solutions, il ne faudra pas s’étonner qu’il y ait de nouvelles explosions sociales dans les semaines à venir.

En 1990, quand le chlordécone fut interdit d’utilisation sur l’ensemble du territoire français, une dérogation à la loi a été prise pour la Martinique et la Guadeloupe afin que les gros planteurs de banane puissent continuer à utiliser ce poison. Si l’État peut déroger à la loi pour les patrons, il pourrait aussi le faire pour les travailleurs en ce qui concerne l’obligation vaccinale.

Les mobilisations ont permis de repousser, à plusieurs reprises, l’application de la loi du 5 août aux Antilles. Pour l’instant, l’État refuse de céder face au mouvement populaire, et surtout refuse de mettre des moyens massivement pour régler les nombreux problèmes. Alors que des milliards ont été donnés aux grands capitalistes sans aucune contrepartie en pleine crise sanitaire, il n’y aurait pas d’argent ni pour la santé, ni pour la jeunesse ?

Le gouvernement Macron est un artificier en train de préparer de nouvelles explosions sociales. Le mépris hautain et colonialiste de l’État comme seule réponse aux travailleurs et à la population laborieuse en est un des détonateurs. La révolte populaire n’est pas terminée.