CO N°1283 (9 avril 2022) – Haïti : les patrons contournent l’ajustement de salaire

Après trois semaines de mobilisations au mois février-mars, les travailleurs de la sous-traitance ont arraché l’ajustement du salaire minimum journalier à 685 gourdes (5,75€). Faire appliquer cet ajustement par les patrons de la sous-traitance est une lutte quotidienne.

Les ouvrières, qui sont la majorité dans les ateliers, travaillent en module sur des lignes de production. Les coupons de tissus y sont taillés en début de ligne donnant des pièces qui sont ajustées tout au long de la ligne par les ouvrières pour produire un vêtement. Payées à la pièce, elles doivent réaliser le quota ou tarif comptabilisé en pièces ou en boites de 100 pièces, pour toucher le salaire de la journée.

L’ajustement de salaire de 500 à 685 gourdes correspondant à 37% d’augmentation devrait être appliqué aussi aux primes et heures supplémentaires.

Quelques rares patrons sur la zone industrielle ont accepté d’appliquer le nouveau salaire minimum de 685 gourdes sans en étendre l’application aux heures supplémentaires.

La majorité des patrons cherchent les moyens de ne pas appliquer le nouveau salaire. Par exemple dans ce groupe coréen qui possède près de sept usines dans le parc SONAPI où les ouvriers continuent à recevoir 75 gourdes par jour pour 1400 pièces réalisées.

Il y a d’autres patrons qui, tout en maintenant les anciens salaires, augmentent le quota journalier à fournir. Comme dans cette autre usine où les ouvrières des modules touchent un salaire inchangé pour des quantités produites exorbitantes allant jusqu’à 2000 pièces par jour.

À l’usine « numéro 1 », le salaire de la journée est inchangé, la direction a même réduit de moitié la prime hebdomadaire. Dénommée « bèl samedi » elle récompense les ouvriers les plus productifs de la semaine. Au lieu de 1000 gourdes, les ouvrières qui ont réussi au prix d’efforts surhumains à fournir le quota pendant 6 jours d’affilée reçoivent à présent 500 gourdes.

Dans certaines usines, pour prévenir d’éventuelles explosions de colère des ouvriers, les patrons ajoutent quelques gourdes aux salaires, somme nettement inférieure aux 37% d’ajustement.

Pour bénéficier de l’ajustement du salaire minimum, les travailleurs ont été obligés de se battre pendant plusieurs semaines. Pour le faire appliquer par les patrons les travailleurs ont à mener d’autres combats car il n’y a pas de cadeau dans cette société d’exploitation.