CO N°1311 (09 septembre 2023) – Gabon – Coup d’État : on prend les mêmes et on continue ?

Bien que très diminué depuis quelques années par suite d’un accident vasculaire cérébral, le président du Gabon, Ali Bongo, a voulu se faire « élire » à nouveau en 2023. Le scrutin du 26 août dernier, qui aurait tourné en défaveur du dictateur, a provoqué une crise politique sur fond d’élection frauduleuse. La crise politique a débouché, mercredi 30 août, sur un coup d’État contre Bongo.

Le Gabon, ce pays d’Afrique équatoriale, à l’ombre de la Françafrique, peuplé de 2,4 millions d’habitants, regorge de richesses, notamment de pétrole et de gaz, de bois précieux et d’hydrocarbures. Les hydrocarbures sont aux mains des multinationales. Seules les infrastructures liées aux exportations sont modernes. La population gabonaise, elle, pour un tiers vit en dessous du seuil de pauvreté. Elle se débat pour survivre et 40 % des jeunes sont au chômage.

Ministre de son père Omar Bongo pendant vingt ans, Ali Bongo lui a succédé en muselant toute opposition. Le vernis démocratique des élections gabonaises s’est écaillé un peu plus en 2016, lorsqu’Ali Bongo a assuré sa réélection en bombardant le QG de son adversaire, faisant 27 morts à quelques pas du camp de l’armée française, qui n’a pas bronché. L’État français est intervenu sans discontinuer, y compris militairement, pour défendre les intérêts des entreprises telles TotalEnergies qui contrôlent l’économie de cette ancienne colonie.

Peu nombreux sont ceux qui déplorent le renversement d’Ali Bongo par un coup d’État militaire, tant le règne des Bongo depuis plus d’un demi-siècle rimait avec enrichissement personnel et soumission aux grandes compagnies françaises.

La France le lâchera-t-elle au profit d’un autre pour garder son contrôle sur le Gabon ?

Le général Brice Clotaire Oligui Nguema, qui a renversé Ali Bongo, a prêté serment lundi au Gabon en tant que président d’une période de transition au terme de laquelle il a promis des élections sans en préciser la date.

Or ce nouvel homme fort est un cousin d’Ali Bongo. Il a commencé sa carrière au service d’Omar Bongo avant de devenir, en 2019, le responsable de la garde présidentielle du fils. Il est connu pour avoir détourné des millions afin d’investir dans l’immobilier en France et aux États-Unis.

Les travailleurs gabonais n’ont rien à attendre de cette révolution de palais. Elle s’est faite aussi contre eux.

Le gouvernement français peut éventuellement se satisfaire de ce changement si les nouveaux dirigeants du pays se montrent accommodants, l’important pour lui étant d’avoir à Libreville, la capitale, un régime qui protège les intérêts des grandes sociétés françaises. Mais la population du Gabon ne verra pas grande différence entre les nouveaux maîtres et les anciens.