Le 12 septembre, la Cour des comptes a publié un rapport qui remet en cause la prime de vie chère de 40 % qu’elle nomme « sur-rémunération des fonctionnaires en outre-mer ». Il s’agirait d’une prime injuste qui plombe les finances de l’État et des collectivités.
Cette prime de vie chère a plus de 70 ans. Elle a été gagnée de haute lutte après une grande grève des fonctionnaires en 1953 aux Antilles, en Guyane et à la Réunion. Forts de cette lutte, les salariés de certaines autres branches du privé, comme les assurances, les banques ou l’énergie, ont pu obtenir aussi une prime de vie chère qui varie de 25 à 40 %.
Cette prime sert à compenser la cherté de la vie aux Antilles. Le salaire d’un fonctionnaire et assimilé permet d’aider enfants ou proches touchés par les 25 à 40 % de chômage.
Ce n’est pas la première fois que la Cour des comptes et l’État derrière lui, veulent attaquer les 40 %. Régulièrement depuis environ une trentaine d’années, plusieurs gouvernements ont tenté de s’attaquer à ce qu’ils considèrent comme un avantage exorbitant des fonctionnaires d’outre-mer.
En réalité, ils mènent une guerre contre les travailleurs à qui ils veulent faire les poches pour renflouer les caisses du grand patronat. Chaque année, l’État déverse 157 milliards d’euros d’argent public, sans aucune contrepartie, sur les grandes entreprises. Au premier trimestre 2023, les entreprises du CAC 40, les plus grosses entreprises françaises, ont engrangé des profits record : 81 milliards d’euros de bénéfices ! La France est la troisième de la planète en nombre de millionnaires : il y en a trois millions et ce chiffre est en hausse. Pourtant, les revenus des 75 foyers français les plus riches sont moins imposés que ceux du reste de la population.
En Guadeloupe, en 2009, 341 foyers payaient l’impôt sur la fortune (ISF). En 2011, Fort-de-France était la première commune d’outre-mer en nombre de foyers assujettis à l’ISF. Macron a supprimé l’ISF en 2018 mais ces chiffres montrent qu’il y a bien des millionnaires dans ces départements parmi les plus pauvres de France.
C’est une guerre de classe que mènent la bourgeoisie et l’État contre les travailleurs et les plus pauvres. En 40 ans, le grand patronat a ponctionné près de 250 milliards d’euros de plus sur ce que les économistes nomment « la valeur ajoutée » : traduction : les richesses produites par le travail.
Pendant ce temps, les salaires sont bloqués alors que les prix continuent d’augmenter. La population est ravagée par le chômage et la précarité et subit de plein fouet la dégradation des services publics.
Les travailleurs ont donc tout intérêt à se préparer à se battre contre une éventuelle suppression des 40 % de vie chère. En ces temps d’augmentation des prix, la prime elle-même ne suffit plus. Elle est rognée par l’inflation. N’empêche que sans elle, ce serait bien pire !
Tout recul des salaires du public est suivi d’un recul de ceux du privé, et inversement. Les travailleurs du secteur privé n’ont donc aucun intérêt à ce que les salaires des travailleurs de la fonction publique soient amputés.
Ce qui est injuste, ce n’est pas que certains perçoivent la prime, mais que l’ensemble des travailleurs du public et du privé ne la touchent pas, et pas seulement dans les départements d’outre-mer mais aussi dans l’Hexagone. De plus, cette prime devrait être intégrée au salaire et donc être comptée pour le calcul des pensions de retraite.
Ne laissons pas notre argent partir dans les caisses du grand capital !