CO N°1333 (14 septembre 2024) – Éditorial – Vie chère, manque d’eau, la colère gronde

Un mouvement de contestation contre la vie chère a débuté en Martinique et en Guadeloupe. En Martinique le 1er septembre près d’un millier de manifestants se  sont rassemblés devant le centre commercial de Dillon appartenant au groupe du riche Béké Bernard Hayot. Ils ont bloqué les abords du Grand Port maritime de Martinique.

La colère s’est exprimée au-delà, avec des jeunes de quartiers populaires de Fort-de-France, allant jusqu’à des affrontements avec les gendarmes après la mise en garde à vue d’un responsable du mouvement.

Les travailleurs du Grand Port maritime ont emboîté le pas au mouvement en refusant de charger ou de débarquer les conteneurs pour exiger des autorités des négociations sur les prix. Des opérations de blocage de plusieurs supermarchés sont aussi menées à Fort-de-France, Ducos et au Robert.

En Guadeloupe le mouvement est moins important mais il a tout de même rassemblé 150 personnes autour d’une action dans le supermarché Carrefour Destreland le 1er septembre, puis une cinquantaine le 8 septembre au supermarché Leclerc de Bas-du-Fort.

Selon l’Insee les produits alimentaires sont en moyenne 42 % plus chers aux Antilles que dans l’Hexagone. L’action des manifestants a montré par exemple qu’un paquet de pâtes Turini vendu à Leclerc en Guadeloupe à 1,48 € coûte 0,82 € dans l’Hexagone, soit 80 % d’augmentation, un lot de papier toilette lotus est à 11,85 € contre 5,35 € dans l’Hexagone, donc le prix gonfle de 121 % ! Les écarts de prix et leur hausse donnent le vertige, et ils sont déjà trop élevés dans l’Hexagone. La population souffre de cette situation. Elle n’est pas mobilisée massivement pour l’instant mais apporte son soutien au mouvement.

Face à ce début de colère populaire le Préfet de Martinique a organisé une « table ronde sur la vie chère » le 5 septembre, promettant de parvenir à « une baisse durable des prix de 20 % en moyenne de 2 500 produits de grande consommation. ». Les manifestants ont refusé de participer à cette table ronde, à huit-clos, avec le Préfet et comptent poursuivre les manifestations.

Face aux plaintes de la population, les représentants de ces capitalistes sortent leur panoplie d’arguments, sur les taxes comme l’octroi de mer et autres intermédiaires. Ils mettent en avant le contexte international, le COVID, la crise de la guerre en Ukraine qui gonfle les prix. Mais surtout ils se gardent bien de dévoiler leurs marges ! Comme des voleurs ils cachent leur butin. Il suffit de regarder la fortune des Hayot, estimée à plus de 300 millions d’euros, ou celle de Rodolphe Saadé, le patron de la CMA-CGM, principal transporteur de conteneurs qui est devenu en 2023 la huitième fortune française, réalisant un profit record de 23 milliards d’euros en 2022. Quelle marge Rodolphe Saadé se fait-il sur chaque conteneur arrivé aux Antilles ?

Le mouvement actuel contre la vie chère n’est peut-être que la partie visible d’une force populaire bien plus considérable qui pourrait se manifester bientôt. Des milliers de gens souffrent aux Antilles mais ils n’ont pas encore osé rejoindre la contestation. De même la colère gronde contre le manque d’eau ou d’eau potable !

Pour imposer la baisse significative des prix mais aussi imposer l’augmentation des salaires, des retraites et des minimas sociaux, pour obtenir de l’eau propre au robinet,  ce mécontentement qui ne s’exprime pas encore devra devenir une véritable déferlante. Une explosion sociale !

Il faudra que des milliers de personnes et de travailleurs mobilisés prennent la rue pour se faire craindre des autorités, pour tenir la bourgeoisie et les représentants de l’État à la gorge, jusqu’à ce qu’ils crachent les augmentations de salaire et la baisse des prix !