Le 13 décembre, des centaines de personnes s’étaient rassemblées devant le tribunal de Fort-de-France pour soutenir Rodrigue Petitot, le leader du RPPRAC (Rassemblement pour la Protection des Peuples et des Ressources Afro-Caribéens). Sa demande de remise en liberté a été rejetée.
Le « R » subit un véritable acharnement judiciaire. Il a été interpellé le 12 novembre parce qu’il est entré dans la résidence du préfet, puis en procès le 2 décembre, pour avoir dit dans une vidéo, vouloir « attaquer » des maires de Martinique. Il a été condamné à dix mois d’emprisonnement alors qu’il parlait « d’attaques politiques ».
Son seul crime, avoir appelé la population à se mobiliser contre la vie chère, à avoir dénoncé la pratique des gros possédants Békés, qui consiste à spolier les travailleurs et la population pauvre en leur faisant payer des prix exorbitants pour les produits.
Les manifestations ont commencé le 1er septembre de cette année. Le RPPRAC réclamait l’alignement des prix de l’alimentaire sur ceux de la métropole, car ils sont 40 % plus chers qu’en France. Des milliers de personnes ont exprimé leur colère dans les rues, mais aussi en manifestant devant les grands supermarchés dont les riches Békés sont les propriétaires, comme Carrefour. Des barrages ont été érigés sur les routes. Des jeunes sur les barrages ont affronté les forces de l’ordre en tirant à balles réelles. Le gouvernement en réponse à la mobilisation a décidé d’envoyer des CRS. Cette décision n’a fait qu’accroître la colère d’une partie de la population. La gendarmerie du Carbet a brûlé le 9 octobre, l’aéroport a été envahi le 10 octobre.
Dans les entreprises, il y a eu des débrayages comme à Leclerc Galleria, les dockers aussi sont entrés en mouvement en soutien à Petitot et au mouvement contre la vie chère. C’est cette action qui a suscité la réunion des élus locaux accompagnés du préfet et des patrons. Un protocole bidon en est sorti, prévoyant la baisse sur 6 000 produits alimentaires. La mobilisation s’est étendue à Paris où des milliers de personnes issues des outre-mer ont manifesté en soutien au RPPRAC et contre la vie chère en outre-mer.
Ce mouvement populaire dérange le pouvoir colonial. L’État et les grands patrons de la distribution cherchent par tous les moyens à l’étouffer et à le discréditer.
Le préfet de Martinique fait croire que ce mouvement prône la division, la haine raciale. Mais cette société coloniale est raciste, elle est divisée en classes sociales avec d’un côté des descendants d’esclavagistes, les gros Békés, des Blancs qui depuis l’abolition de l’esclavage continuent d’opprimer les nouveaux esclaves salariés qui sont en grande partie des Noirs et des Indiens. Le préfet est aux ordres de cette classe dominante.
Quelques mois après les mobilisations contre la vie chère, les patrons de la grande distribution n’ont toujours pas cédé sur la baisse des prix. Stéphane Hayot se justifie en disant que c’est à l’État d’appliquer la continuité territoriale. Ils refusent de dévoiler et de diminuer leurs marges sur les prix. Ce sont eux qui fixent nos salaires et notre pouvoir d’achat. Pour les faire plier, il s’agit aujourd’hui de mener une lutte collective d’une grande ampleur dans tous les secteurs, public comme privé. Le 5 décembre les dockers ont montré la voie. En soutien au « R » ils ont annoncé la suspension de « toute réception et livraison de conteneurs ». C’est par une lutte offensive et consciente qu’on pourra imposer la baisse des prix, des augmentations des salaires et leur indexation sur les prix. Ce qu’il faudrait c’est mener la lutte encore plus loin, jusqu’à exproprier ces patrons rapaces qui n’hésitent pas à utiliser les caisses de l’État colonial pour obtenir toutes sortes d’avantages.