En juillet 1985, suite aux manifestations populaires, Pointe-à-Pitre et ses environs furent entourés de barricades qui paralysèrent le pays pendant près d’une semaine. Ces manifestations avaient pour origine la demande de libération de Georges Faisans, un militant emprisonné, coupable d’avoir réagi violemment contre l’attitude raciste d’un professeur blanc.
L’affaire
C’est en 1984 qu’un professeur blanc du lycée de Baimbridge, Jean Wacheux, donnait un coup de pied à un élève noir. Geste qui demeure très sensible dans la mémoire collective. Professeur dans le même l’établissement Georges Faisans agressa Jean Wacheux d’un coup du plat de coutelas en réaction à cet acte raciste. Georges Faisans, également militant nationaliste au Mouvement populaire pour la Guadeloupe indépendante (MPGI) fut arrêté et emprisonné en Guadeloupe.
Lors du premier jugement il fut condamné à quatre ans de prison ferme. En appel, sa peine fut réduite, mais à trois ans de prison. La sentence était lourde, il s’agissait de condamner un militant nationaliste surtout à l’époque où plusieurs organisations indépendantistes mettaient en pratique la lutte armée en Guadeloupe.
Pour s’opposer à la décision rendue, Georges Faisans entama une grève de la faim dans la prison de Basse-Terre le 3 juin 1985. Le 25 juin il fut transféré à la prison de Fresnes en France. En juin les actes de protestation en soutien à Faisans se multiplièrent : manifestations, meeting de solidarité, tracts, conduisant le procureur Valère le 10 juillet à demander la libération du militant, mais la décision est refusée par les juges français. Le 20 juillet plusieurs militants et personnalités entamaient une grève de la faim devant le Centre des Arts de Pointe-à-Pitre.
L’explosion populaire du 24 au 29 juillet 1985
Le 21 juillet 1985, 21 organisations politiques, associations, syndicats, se rencontraient pour décider d’une action commune pour exiger la libération immédiate de Georges Faisans en grève de la faim depuis 48 jours. Le matin du 24 juillet des barrages sont dressés par des petits groupes de militants aux différentes entrées de Pointe-à-Pitre. Les militants sont rejoints rapidement par les jeunes et les travailleurs, des quartiers pauvres surtout, qui prennent en main les barrages. La ville fut complètement bloquée. Malgré la protestation de quelques militants, le mouvement populaire et les barrages n’allaient pas retomber durant cinq jours ! Les manifestants tenaient les barrages, parfois affrontaient les CRS et les gendarmes. Tout une activité s’organisait autour des barrages. Détruits ils étaient aussitôt reconstruits par les habitants débordants de ressources. Ce coup de colère était déclenché par l’exaspération contre le pouvoir colonial mais au-delà c’était tout le mécontentement plus profond de la population pauvre qui s’exprimait.
C’est une large couche de la population et surtout les jeunes des quartiers pauvres qui en soutenant les barrages durant cinq jours, jusqu’au lundi matin, firent reculer le pouvoir colonial français. Georges Faisans fut libéré le lundi 29 juillet ! Pour les milliers d’habitants, travailleurs, chômeurs de Guadeloupe, c’est une revanche sur l’oppression coloniale et raciale ! Une victoire sur le pouvoir blanc.
Si les principales organisations populaires se sont unies pour déclencher cette lutte, c’est surtout la lutte des Noirs pauvres qui a été la plus pressante et la plus déterminante dans cette victoire.