Dans la nuit du 14 au 15 août 1791, des esclaves se sont rassemblés dans un lieu-dit reculé d’une habitation (plantation) de la province du Nord, à Saint-Domingue. La cérémonie du Bois-Caïman a marqué le début de la révolution haïtienne, durant laquelle les esclaves insurgés finirent par triompher après 13 ans d’une lutte acharnée.
Cette assemblée avait été convoquée par Boukman, un esclave né libre, capturé sur la côte ouest de l’Afrique et déporté ensuite dans les Caraïbes. Remarqué pour ses aptitudes, il était devenu commandeur (chef d’équipe) sur une habitation. Boukman était aussi un prêtre de la religion vaudou, un hougan. Il fut assisté lors de la réunion de Bois-Caïman par une prêtresse, la mambo Iman.
De nombreux esclaves pratiquaient en secret le culte vaudou, interdit par les maîtres, qui symbolisait à la fois leur attachement à l’Afrique et leur aspiration à la liberté. L’un des chants vaudous les plus populaires affirmait : « Nous jurons de détruire les Blancs et tout ce qu’ils possèdent ; plutôt mourir que de faillir à ce serment ». La cérémonie du Bois-Caïman fut donc à la fois une réunion politique et une assemblée religieuse, le rituel vaudou étant censé rendre les participants invulnérables.
Un soulèvement massif
Les conjurés firent le serment de se révolter tous ensemble quelques jours plus tard, dans la nuit du 22 au 23 août 1791. Ce jour-là, les esclaves de cinq habitations tuèrent leurs maîtres et incendièrent les bâtiments. Ce fut le point de départ d’une insurrection qui dura plusieurs semaines, la révolte des esclaves se propageant dans toute la riche plaine du Nord.
Cette province très peuplée était une des zones où les esclaves étaient particulièrement indociles. Ils étaient regroupés par centaines dans des habitations sucrières qui ressemblaient déjà à des usines modernes, par certains aspects. Les plantations étaient de plus assez regroupées. Cela favorisait la circulation des informations entre les esclaves ainsi que les possibilités de se réunir pour organiser leur soulèvement. Les 12 000 esclaves de la ville du Cap faisaient aussi partie de la conspiration.
Les esclaves révoltés étaient armés d’outils agricoles, de piques, parfois d’un simple morceau de métal. Selon les historiens, il y eut un millier de morts parmi les maîtres et leurs familles. Les incendies détruisirent 1 200 plantations de café, et 161 sucreries. Après dix jours, Boukman et ses troupes réussirent à atteindre les portes de la ville du Cap, la capitale de la région nord et le principal port de commerce de Saint-Domingue.
Boukman fut tué dans les combats devant la ville, et sa tête fut exposée sur une pique. De nombreux insurgés furent exécutés, souvent torturés. Ce fut même le cas de certains esclaves qui ne s’étaient pourtant pas soulevés. Cette répression cruelle poussa finalement de nombreux esclaves dans le camp des insurgés. On estime qu’ils étaient 100 000 au bout d’un mois.
La voie de la victoire !
Le soulèvement organisé par Boukman marquait le début de la révolution haïtienne.
Au bout d’un mois de combats et de destructions, les insurgés du Nord commencèrent à s’organiser. Une discipline militaire fut instaurée dans le camp des esclaves révoltés, sous la direction des lieutenants de Boukman, Jean-François, Biassou et Jeannot. Ils furent rapidement rejoints par Toussaint Louverture. Des tentatives de négociations eurent lieu avec les Blancs retranchés au Cap, sans succès. La révolution haïtienne avait commencé. Elle ne se termina qu’avec la victoire militaire totale des esclaves d’Haïti contre les troupes de Bonaparte venues rétablir l’esclavage.
L’indépendance fut proclamée le 1er janvier 1804.